Dans son récent rapport publié le mercredi 28 novembre portant sur le bilan de la gouvernance de Félix Tshisekedi de 2022 à 2025, l’ODEP (Observatoire de la dépense publique) peint un tableau sombre de ce qu’a été la gestion des finances publiques de la République démocratique du Congo. Le constat de l’ODEP se résume en : « irréalisme et non crédibilité du budget, dépassements budgétaires, fléau de la corruption et détournements, des marchés de gré à gré, budgétisation non exhaustive, dépenses irrationnelles, absence d’un plan de développement ».
Outre l’appel de cette Organisation de la société civile au respect de la Loi relative aux finances publiques et aux règles de bonne gouvernance, elle recommande notamment de changer la vision globale en matière de politique économique en RDC.
Selon l’ODEP, la RDC devrait opter pour « une voie de développement endogène ». « Cette voie exige que notre société reste elle-même, qu’elle puise ses forces dans sa culture et dans les formes de pensées et d’action qui lui sont propres, afin que notre développement devienne une réalité de transformation permanente de notre système social. Opter pour un développement endogène, c’est faire en sorte que celui-ci réponde à des valeurs communes, à une inspiration cohérente, à des espoirs et des besoins partagés, où se reconnaît l’ensemble de la collectivité nationale, et qu’il puisse mobiliser ses volontés, ses énergies, ses imaginations rassemblées », explique l’ONG dans son rapport.
Ce développement endogène n’aura de sens, selon l’ODEP, que s’il renforce et fortifie la créativité sociale. « Il ne pourra réussir que s’il est assumé par des populations pleinement conscientes de sa nécessité, aptes à agir et décidées à le faire. Cela veut dire qu’il faudra parier sur l’homme et ses possibilités, lui donner des raisons de vouloir aller de l’avant, de moduler les innovations technologiques, sociales, politiques, culturelles de sorte qu’elles soient à chaque étape, assumées par la population elle-même et vécue par elle comme un dépassement créateur et bénéfique. On est bien loin des modèles qui ont inspiré notre construction économique actuelle qui a plutôt marginalisé à tout point de vue la population. Toutes les réformes à envisager dans chaque secteur doivent répondre aux exigences de cette voie de développement », estime l’ODEP.
Enfin de compte, pour construire ce développement endogène, l’ODEP propose neuf pistes à suivre afin d’atteindre les objectifs visés :
- Ce développement est avant tout populaire, donc national, pro-pauvre ;
- L’industrie doit être mise au service de la productivité agricole ;
- Il faut abandonner la production de luxe pour le marché local et à l’exportation fondée sur la reproduction d’une force de travail bon marché (mieux servir les masses urbaines) ;
- N’ayant pas réalisé une révolution agraire préalable à la révolution industrielle, nous devrons renverser la valeur, c’est-à-dire que nous devrons articuler un secteur moderne de l’industrie rénovée dans ses orientations de base, au secteur des petites industries rurales qui permettent de mobiliser directement les forces latentes de progrès ;
- Seule une révolution dans le secteur agricole pourra financer une industrialisation saine, dégager un surplus vivrier capable d’assurer l’indépendance nationale ;
- L’industrie doit être mise au service des masses urbaines et rurales pauvres et cesser d’être guidée par la logique financière qui favorise le marché local privilégié et l’exportation vers le centre ;
- Les emprunts éventuels à la technologie dont des modèles nouveaux devront être imaginés seront fait en fonction des besoins internes du développement populaire ;
- Ce développement, même s’il exige de compter d’abord sur ses propres forces, n’a rien à voir avec l’autarcie. Le pays se doit de recourir à l’importation des inputs nécessaires à l’accélération de son développement (équipement, énergie, certaines matières premières). Les échanges avec l’extérieur restent nécessaires mais doivent être qualitatif ;
- Il va falloir développer l’autonomie collective avec les pays du Sud en agissant dans deux directions : 1) L’entraide mutuelle (échange des matières premières, en évitant plusieurs intermédiaires). 2) Contrôle national de l’exploitation des ressources naturelles.
Amédée Mwarabu