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L’économie congolaise demeure sous financée. En effet, les statistiques de ces dernières années renseignent que la part du crédit à l’économie demeure en deçà de 12 % du PIB, soit un niveau inférieur à la moyenne subsaharienne et à la norme acceptable, soit plus de 40 % du PIB. Ce financement de l’activité productive est obtenu grâce au concours principalement du secteur bancaire et, dans une moindre mesure, par des institutions de microfinance et/ou des coopératives d’épargne et de crédit.

Ainsi, en dépit de l’augmentation du nombre de ces institutions, leur contribution au financement de l’économie demeure insignifiante. Cette situation résulte notamment du niveau encore élevé du coût du crédit, composé notamment du taux d’intérêt débiteur nominal, des commissions, des frais de dossier et autres. S’agissant du taux d’intérêt nominal, la moyenne du secteur s’établit actuellement à 26,89% l’an et 15,68% l’an, respectivement en monnaies nationale et étrangère.

En 2023, le taux de réemploi, représentant le rapport entre l’encours global des crédits et le niveau des dépôts collectés par le système bancaire, s’est établi à 60,5  %. Les crédits bruts se sont situés à 7.278,69 millions d’USD contre un niveau des dépôts de l’ordre de 12.034,36 millions d’USD. Il en résulte un paradoxe entre la surliquidité du système bancaire (attestée par le faible niveau du taux de réemploi) et le sous-financement de l’économie par voie du crédit bancaire). Les contraintes pesant sur le crédit sont liées à l’environnement, à l’offre et à la demande.

Au niveau de l’offre, il y a lieu de relever: – la fragilité sécuritaire, attestée par le maintien, voilà plus de deux décennies, de l’indicateur de sécurité au niveau 3, en raison notamment de la persistance du conflit à l’Est du pays ; – la fragilité politique, en raison de la démocratie naissante et des difficultés émaillant son processus, lesquelles resurgissent sur les autres domaines de la vie nationale notamment sous forme d’incertitudes, amenant à une restriction des investissements ; – un important déficit en infrastructures (Energie, connexion internet, réseaux routier, ferroviaire, etc.), ce qui freine les opportunités économiques et limite l’expansion de l’activité bancaire; – un cadre juridique et judiciaire peu favorable au climat des affaires et dont l’instabilité est à la base, entre autre, de la lenteur ou de l’incertitude dans la réalisation des hypothèques en cas des crédits non remboursés ; – la fragilité macroéconomique.

Par ailleurs, l’offre du crédit est rationnée dans le cadre de la gestion de risques et des incertitudes. Ainsi, en dépit de l’existence d’un système bancaire surliquide, attestée par des niveaux des dépôts nettement supérieurs à celui du crédit, la demande du crédit, dans les faits, excède l’offre. Cette situation débouche sur des taux d’intérêt débiteurs prohibitifs auxquels viennent s’ajouter d’autres frais donnant au coût du crédit un caractère rédhibitoire.

Au niveau de la demande, il importe de relever trois types des contraintes. Les premières procèdent des conditions posées par les banques pour accéder au crédit: (i) l’ouverture préalable d’un compte disposant d’un minimum d’avoir et (ii) le parrainage ou la garantie de remboursement. Les deuxièmes difficultés tiennent à l’existence du chômage massif dans le chef de la population, l’excluant ipso facto des services bancaires. La troisième difficulté tient de l’absence de la culture financière et même de la méfiance de la population vis-à-vis du système bancaire. Il en est ainsi de la pratique de frais de tenue de compte transformant les soldes créditeurs en soldes débiteurs. Plusieurs réformes devraient être mises en place à l’effet d’améliorer le financement de l’économie congolaise, gage de la réalisation d’une croissance économique autocentrée.

Au niveau du Gouvernement de la République, il sera question de: (i) s’engager notamment en ce qui concerne la fragilité macroéconomique, l’instabilité sécuritaire, l’instabilité judiciaire et juridique ainsi que les déficits en infrastructures de base; (ii) implémenter les mesures idoines pour l’amélioration du climat des affaires (iii); mettre en œuvre des mesures et reformes en vue d’obtenir l’amélioration de l’environnement du crédit ainsi que réduire la prime de risque et certaines charges d’exploitation qui contribuent à surcharger le taux débiteur des banques ; (iv) défiscaliser les provisions sur créances douteuses, exempter les intérêts sur le crédit à la consommation de la TVA et (v) concernant les Avis à Tiers Détenteurs (ATD), revisiter les textes légaux en vigueur pour alléger les modalités sur les saisies de compte bancaire.

La Banque Centrale du Congo devrait: (i) accélérer la modernisation de la centrale de risques et la création des structures spécifiques du type privé, en l’occurrence les CREDIT BUREAU pour collecter les informations sur la clientèle au-delà du secteur financier, aux fins de la prévention contre le surendettement; (ii) accompagner les banques, en matière de supervision, de lutte contre la dollarisation et maintenir le pacte de stabilité; (iii) la poursuite des réformes sur le cadre de la politique monétaire et sur la réserve obligatoire et (iv) accélérer la mise en place d’un marché financier structuré en RDC, capable de mobiliser l’épargne intérieure et extérieure en vue d’un meilleur financement de l’économie à un coût abordable. Et enfin, les banques commerciales devraient envisager les actions suivantes : (i) rationnaliser leur coût du crédit, à travers l’assainissement de leur coût d’exploitation; (ii) alléger les conditions d’accès au compte; (iii) lutter contre la discrimination dans le traitement des dossiers bancaires et (iv) calculer et publier, dans les meilleurs délais, leur taux effectif global pour une plus grande transparence dans ce secteur.

Analyse tirée du Rapport sur la Politique monétaire de la Banque centrale du Congo de 2023

By amedee

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