La gouvernance actuelle de la SNEL a pu enregistrer quelques signaux positifs. Parmi ces signaux il y a lieu de noter la situation financière et la trésorerie de la SNEL qui se sont sensiblement améliorées grâce à une gestion plus rigoureuse. Cependant, l’on craint que la nouvelle parafiscalité qui vient s’ajouter à la pression fiscale existante ne puisse annihiler les efforts du Comité de gestion. Pour autant, la SNEL, engagée dans de nouveaux programmes de financement avec les partenaires financiers internationaux, entend concrétiser plusieurs grands projets structurants afin d’accroître le taux d’électrification en RDC.
Présentement, la SNEL produit 90% de l’électricité consommée en République démocratique mais cela ne représente que 3% de la consommation annuelle d’énergie du pays qui reste dominée par le bois-énergie (le makala), un marché estimé à 4 milliards de dollars par an, soit près de 10 millions de dollars par jour.
L’endettement de la SNEL, évalué à 3 milliards de dollars (4,5% du PIB en 2023), et dominé par les prêts chinois et bilatéraux (clients miniers), est difficilement soutenable à l’heure actuelle. La raison ? Près de 60% des recettes de l’entreprise sont consacrées au service de la dette.
En ce qui concerne la facturation forfaitaire, seul 1 client sur 5 dispose d’un compteur. Ceci plombe le taux de recouvrement des recettes qui est exacerbé par le non-paiement des factures de l’Etat propriétaire et des entreprises publiques qui consomment près de 30% de l’électricité dans les villes, soit 15% de toute la production SNEL, sans contrepartie financière.
Ce tableau sombre montre que la SNEL traverse depuis plusieurs décennies une grave crise financière et opérationnelle qui se traduit par un déficit de l’offre et un service à la clientèle non satisfait.
A travers l’ensemble du pays, le déficit structurel dans la fourniture de l’électricité est de l’ordre de à 5 GW, entraînant des niveaux de délestage qui se traduisent par des coupures de courant quotidiennes.
Selon la SNEL, ces délestages sont amplifiés par la surcharge des équipements déjà vétustes ou insuffisants, les sabotages des installations SNEL, le vol des câbles de cuivre et des cornières des pylônes ainsi que du fait de l’explosion des raccordements frauduleux.
Quelques avancées
En dépit de toutes ces pesanteurs énoncées ci-haut, la SNEL enregistre des performances sur le plan de la gouvernance. Depuis la fin de l’année 2023, la situation financière et la trésorerie de la SNEL se sont sensiblement améliorées grâce à une gestion plus rigoureuse du Comité de gestion dirigé par le DG Fabrice Lusinde et à la hausse du tarif haute tension.
Dans cet ordre, depuis janvier 2024, la SNEL ne recourt plus aux crédits à court terme et vis-à-vis des banques commerciales locales. Ceci a permis de réduire l’encours de crédit de près de 60%, marquant ainsi un pas décisif dans sa politique de désendettement et la possibilité de disposer de plus d’OPEX (opérations extérieures).
Cependant, malgré ces résultats glanés du fait de la bonne gouvernance, la situation de l’entreprise reste fragile. Il est à craindre que ces avancées obtenues soient mises en péril avec la nouvelle parafiscalité qui vient s’ajouter à la pression fiscale existante.
Toutefois, depuis deux ans, de nouveaux programmes de financement avec la Banque mondiale, la Banque Africaine de Développement, la KfW (agence allemande de développement), la JICA (agence japonaise de développement) ou l’Agence Française de Développement associée à l’Union Européenne ont été finalisés et sont en cours de mise en œuvre.
Bien plus, un Master Plan a été défini avec la GCM et les Opérateurs miniers. Un partenariat avec John Cockeril devrait permettre de redynamiser la Recherche et le Développement.
Dans ce lot des signaux positifs, tout indique que la réussite des projets pilotes de digitalisation avec le développement de l’application SNEL & Moi et le partenariat avec Blue Energy vont permettre des avancées significatives dans l’amélioration du Service à la Clientèle et de la Communication.
Rappelons que le 20 septembre dernier, le Gouvernement a adopté une nouvelle politique générale des entreprises publiques. C’est dans ce cadre que la SNEL a signé un contrat de performance avec l’Etat afin de poursuivre son redressement qui repose notamment sur la régularisation de ses titres et concessions, le paiement des créances et des consommations de l’Etat, la restructuration de sa dette, une réévaluation des investissements, une meilleure communication, la digitalisation du service à la clientèle et de la gestion des réseaux urbain couplée à la conquête des parts de marché du bois-énergie (4 milliards $) non sans oublier un programme de renforcement des capacités et un plan de relève axé sur le cœur de métier et les NTIC.
A noter que la nouvelle politique proposée par le Ministre du Portefeuille et adoptée par le Gouvernement repose sur 10 axes parmi lesquels on peut citer : les investissements et activités, le financement, les participations, la fiscalité et la parafiscalité et la trésorerie.
Des projets dans le pipeline
Il sied d’indiquer que le plan opérationnel 2024-2026 a été actualisé pour prendre en compte les résultats attendus de l’Etat propriétaire sous la houlette du Ministre du Portefeuille.
Au nombre des grands projets structurants sur lesquels le Comité de gestion compte pour accroître le taux d’électrification dans le pays, bien sûr quand les finances de la SNEL seront mieux consolidées et la dette restructurée, il y a :
- La Digitalisation du service à la clientèle Snel & Moi : compteurs communicants (SNELBOX) et assainissement/modernisation des cabines et réseaux basse tension de tous les réseaux urbains de SNEL dans le cadre de la nouvelle politique commerciale.
- La finalisation de la construction du barrage de Katende et des réseaux de transport associés vers Kananga (Kasaï central), Mbuji-Mayi (Kasaï Oriental) et Mwene Ditu (Lomami). Ce qui permettra un soutien au développement de l’agro-industrie et une substitution de la consommation du bois énergie par l’électricité.
- La réhabilitation et l’extension du barrage de Mobayi Mbongo ainsi que la construction de la ligne de transport Mobayi-Mbongo – Businga – Gemena et réseaux urbains associés du Nord et Sud Ubangi ainsi que de la Mongala. Ce projet vise à soutenir le développement des agro-industries dans la zone s et la substitution du bois-énergie par l’électricité.
- La construction des centrales hydroélectriques sur la rivière Luapula (Haut Katanga) ainsi que des réseaux de transport associés vers Tanganyika (Bendera) et Sud Kivu (Ruzizi 1, 2 et 3) et Interconnexion avec le réseau de Transport Sud de SNEL y compris la construction du tronçon de ligne entre Kibula (Lualaba) et Kamina (Haut Lomami). Ce qui va soutenir les industries de transformation des minerais stratégiques et l’agro-industrie et permettre la substitution du bois-énergie par l’électricité.
- La construction de la centrale hydroélectrique de Wania Rukula et des réseaux de distribution associés dans les provinces de la Tshopo, du Sankuru (Lodja), du Maniema (Kindu) et du Nord Kivu (Walikale). Avec comme résultat, le soutien aux agro industries et industries de transformation des minerais stratégiques et la substitution du bois-énergie par l’électricité.
- La construction de nouvelles centrales hydroélectriques de la rivière Inkisi (en attendant la structuration du programme Grand Inga 3) + construction de la ligne Maquela Do Zombo (Angola) – Kwilu (Kongo central) et de la ligne Maluku – Kikwit. Ce projet a pour avantage le soutien à la croissance urbaine, au développement des zones économiques spéciales de Kinshasa et de l’industrie des bâtiments et travaux publics au Kongo central et à Kinshasa et la substitution du bois-énergie par l’électricité.