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La monnaie n’est pas la richesse en soi. Elle n’en est qu’un instrument, un facilitateur, un outil de transaction, au même titre que d’autres facteurs de production comme le travail, le capital ou la technologie. Cette vérité fondamentale, longtemps ignorée dans les écoles économiques classiques, a été mise en lumière par Adam Smith dans son œuvre magistrale *La richesse des nations*. Il y souligne que la véritable richesse réside non pas dans l’accumulation de monnaie ou de métaux précieux, comme le croyait le mercantilisme, mais dans la capacité d’un pays à produire, à échanger et à se développer de manière continue dans le temps et dans l’espace.
Le mercantilisme, doctrine dominante avant les Lumières économiques, fondait la puissance d’un État sur la possession d’or, d’argent ou d’autres ressources monétaires. Cette vision a longtemps justifié l’accumulation obsessionnelle de monnaie au détriment d’une dynamique productive. Or, on s’est rendu compte au fil du temps qu’un pays pouvait disposer de grandes réserves d’or tout en étant frappé de stagnation économique, de chômage massif et de pauvreté sociale.
 La richesse véritable, c’est la capacité d’un État ou d’un individu à transformer les ressources, à produire de la valeur, à innover et à générer des biens et services utiles, durablement. La monnaie ne devient un levier de développement que si elle est intégrée dans une politique économique cohérente, soutenue par une infrastructure de production efficace, un tissu industriel dynamique, une éducation de qualité et une gouvernance rigoureuse.
Malheureusement, cette compréhension reste encore floue dans certaines économies postcoloniales comme la nôtre. On nous accorde la souveraineté monétaire, mais sans infrastructures de production, sans politiques industrielles ambitieuses, sans stratégie d’innovation. Ainsi la monnaie que nous émettons devient impuissante, déconnectée des réalités du marché.
Ce malentendu se prolonge dans la sphère de politiciens et par ricochet de quasiment tous les congolais, où l’enrichissement personnel se fait par la thésaurisation de liquidités plutôt que par la création de richesse réelle. Accumuler des billets dans une économie sans pouvoir d’achat, sans productivité, sans innovation, sans stabilité, c’est entretenir une illusion de prospérité. Même les investissements immobiliers, pourtant vus comme des valeurs refuges, se retrouvent d’une part inefficaces dans un environnement national coûteux, incertain et peu compétitif et d’autre part, insécurisés dans un environnement extra national.
La monnaie ne fait pas la richesse. Seule une économie productive, fondée sur le travail, l’innovation, la stabilité institutionnelle et la justice sociale, peut créer durablement les conditions d’un vrai développement. La compréhension de cette vérité devrait guider nos politiques économiques si nous voulons réellement sortir du cercle vicieux de la pauvreté.
Luc Alouma M.

By amedee

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