Dans son rapport publié le 9 juillet 2025 portant sur l’exécution du Budget 2024, l’ODEP (Observatoire de la dépense publique) note une gestion publique, largement déconnectées des priorités sociales et territoriales fixées par la Constitution. Cette organisation constate que malgré une mobilisation correcte des recettes par les régies financières, les dépenses ont été orientées prioritairement vers le fonctionnement de l’appareil d’État, au détriment des droits fondamentaux de la population et des impératifs de développement équitable.
Les secteurs sociaux tels que l’éducation, la santé, ou la protection sociale demeurent sous-financés, et la faible exécution des investissements publics ne permet pas de concrétiser les ambitions notamment du Programme de Développement Local (PDL-145). Pire, l’exécution du Budget 2024 est même en contradiction avec plusieurs dispositions de la Constitution ainsi que de la Loi organique n°11/011 du 13 juillet 2011 relative aux finances publiques.
La Loi de finances 2024 reflète une volonté politique affirmée de transformation, à travers des priorités claires : développement local, sécurité nationale, rationalisation des charges courantes. Cependant, son architecture révèle des limites structurelles majeures. D’une part, les institutions politiques captent une part excessive des ressources, au détriment des secteurs sociaux et productifs. D’autre part, plusieurs lignes de crédits sont budgétisées sans garanties de financement, notamment les projets à financement extérieur ou les transferts aux provinces, ce qui affaiblit la sincérité de l’exercice. La planification opérationnelle reste inaboutie : les crédits sont votés sans calendrier réaliste ni dispositif clair de mise en œuvre, exposant l’exécution à des retards, des goulots d’étranglement et des réaffectations arbitraires », écrit l’ODEP dans son rapport.
Sans équivoque, cette organisation citoyenne conclut que « le budget 2024 ne reflète pas les droits garantis par la Constitution, ni les engagements gouvernementaux inscrits dans la Loi de finances. Il continue de privilégier la logique administrative et la souveraineté institutionnelle, au détriment de la souveraineté sociale, éducative et territoriale. La RDC ne peut aspirer à une croissance inclusive sans une refondation de sa gouvernance budgétaire, articulée autour de la justice sociale, de l’équité territoriale et de la redevabilité ».
Dès lors, pour une redistribution équitable des ressources publiques, il Une application effective du fonds de péréquation (art. 181) ; Une priorisation réelle des secteurs sociaux (arts. 43 et 47 de la constitution) ; et une exécution budgétaire conforme aux principes de la LOFIP et de l’article 6.
« Le budget ne peut plus être un outil de survie institutionnelle. Il doit devenir l’instrument central du contrat social entre l’État et les citoyens », clame l’ODEP.
Plus concrètement, dans son analyse, cette ONG démontre que la structure budgétaire 2024 reste largement dominée par les dépenses de fonctionnement, avec près de la moitié du budget orienté vers les charges récurrentes (salaires, fonctionnement des institutions), au détriment des investissements structurels.
Quant aux investissements publics, bien que présentés comme une priorité présidentielle et stratégique dans l’exposé des motifs de la Loi de Finances 2024, ne représentent que 24 % du budget et accusent un retard chronique dans l’exécution réelle (moins de 15 % liquidés sur l’année selon les états de suivi budgétaire), soit à peine 3,6%.
En ce qui concerne les transferts et subventions (rétrocessions aux provinces, subventions aux secteurs sociaux), ils manquent de lisibilité, et ne sont que partiellement exécutés, aggravant les déséquilibres entre institutions centrales et entités décentralisées.
Le fonds de péréquation, inscrit à hauteur de 1 957 milliards CDF (771,84 millions de dollars US) conformément à l’article 181 de la Constitution, n’a fait l’objet d’aucun décaissement sur toute l’année 2024. Ce non-respect du principe de solidarité nationale constitue une rupture de l’équilibre budgétaire entre provinces et pouvoir central, note l’ODEP.
Bref, le budget exécuté en 2024 reflète un budget encore trop rigide, administratif et peu réformateur, ne répondant ni aux exigences de développement humain ni aux impératifs d’équité territoriale.
Amédée Mwarabu