Avec l’avènement du Centre financier de Kinshasa, actuellement en construction, la République démocratique du Congo envisage la création d’une bourse financière. Ce qui serait une première dans le pays. Dans cet entretien, www.finances-entreprises.com a approché Aimé Lambala qui est un expert en hautes finances pour parler des étapes que la RDC doit franchir dans la perspective de création d’une bourse. De son avis, un des préalables est la création d’une Autorité de régulation du marché boursier qui doit être totalement indépendante de la Banque centrale du Congo et des politiques. Aimé Lambala estime aussi que l’existence de banques d’investissement est un préalable. De son avis, dans un premier temps, on peut créer une Bourse avec au départ même cinq entreprises triées dans le secteur bancaire ou parmi les sociétés de télécommunications. Interview
Propos recueillis par Amédée Mwarabu
Finances & Entreprises : quelle est l’utilité d’une bourse (marché financier) pour un pays comme la RDC ?
Aimé Lambala : Une bourse ou marché financier, est un endroit où les entreprises se financent, en émettant des titres financiers (actions, sicav, produits dérivés, obligations, certificats de dépôts…), pour leur compte ou pour les comptes des tiers, par l’intermédiaire des banques.
Quelles sont les étapes pour que la RDC crée une bourse financière ou des matières premières ?
En premier lieu, il faut une institution indépendante pour certifier les comptes financiers des entreprises, collectivités, entités, qui veulent s’introduire en bourse. En France, il y a l’Autorité de régulation des marchés financiers (AMF). Et aux Etats-Unis c’est le SEC (Securities Exchange Commission) qui régule le marché boursier. Une entreprise qui veut se financer sur le marché financier (bourse) doit se faire conseiller par une Banque d’investissement pour préparer son introduction. Cela se passe dans le marché primaire au sein de la banque d’affaires. Ici, la Banque d’investissement, qui est le marché primaire, doit déterminer le prix des titres à proposer sur le marché primaire en premier et secondaire pendant l’introduction. Dans le marché primaire, la Banque propose aux fonds, banques, des actions qui seront dans le marché primaire pour achats.
En ce qui concerne, le marché secondaire (bourse des valeurs), la Banque d’investissement doit faire une demande à l’Autorité qui gère la bourse pour l’introduction d’une nouvelle société. Et donc, il faut déterminer les nombres titres (actions), le prix, la capacité financière de la société et la moralité des dirigeants. Après la certification par l’Autorité de régulation de la bourse, les titres seront proposés sur le marché pour achats et ventes, lors de l’introduction à un prix fixé. Mais le prix peut varier selon la capacité des acheteurs et vendeurs (hausse ou baisse).
Est-ce que la dollarisation de l’économie congolaise n’est-elle pas un frein à la création d’une bourse en RDC ?
La dollarisation de l’économie serait un frein par rapport à l’appréciation de la monnaie nationale dans l’économie réelle et financière. Mais en bourse, les titres peuvent être côtés en dollar et franc congolais.
Quelle différence y’a-t-il entre un marché financier et un marché boursier ?
Le marché financier est un endroit où chaque acteurs (privé, institutions, autres, peuvent négocier : achats, ventes, des titres financiers via les banques, les ordinateurs, les téléphones et autres plateformes digitales. Il y a même la possibilité d’effectuer des achats et ventes des devises via un ordinateur depuis chez soi à la maison. Quant au marché boursier, c’est est un lieu fixé négocie directement les traders, les banques en vue des achats et ventes. Cet endroit est réservé aux professionnels seulement de la finance.
En RDC, il existe un marché financier des Bons et Obligations du Trésor, initié par le gouvernement. Quel est votre regard sur ce marché financier local ?
Quand un État veut se financer en interne, il recourt aux émissions de la dette par Obligations et Bons du Trésor. Bien sûr en l’absence de son implication dans les marchés internationaux. Seulement, cette pratique pour la RDC handicape les entreprises privées à se financer surs le marché de crédits à moyen et long terme.
En 2024, le gouvernement congolais a levé presque 1,2 milliard USD sur le marché local des Bons et Obligations du Trésor. Votre commentaire ?
C’est intéressant. Mais, cela sèche la liquidité dans les marchés interbancaires. Donc, les banques commerciales ne peuvent pas financer directement l’économie réelle. Le trésor public prive les entreprises à accéder à plus de 1,2 Milliard de dollars, plus intérêts.