Plusieurs secteurs économiques sont déjà entre les mains des étrangers comme les mines, les télécommunications, les banques, le commerce de grandes surfaces, mais la RDC pense à réviser la loi agricole pour attirer davantage des investissements étrangers. Une extraversion qui cache mal l’absence de volonté politique pour concrétiser la vision présidentielle de la revanche du sol sur le sous-sol.
Dans sa communication au cours du Conseil des ministres du 29 août 2025, le président de la République, Félix Tshisekedi, a appelé au parachèvement l’écosystème légal agricol en RDC par la révision de la Loi agricole de 2011.
« Si nous voulons atteindre la sécurité alimentaire, réduire nos importations et valoriser nos immenses potentialités, nous devons non seulement cultiver, mais aussi parachever l’ensemble de l’écosystème agricole de notre pays. Sur le plan juridique et institutionnel, le Président de la République a rappelé que l’adoption en 2011 de la Loi portant principes fondamentaux relatifs à l’Agriculture a marqué une avancée majeure. Ce texte intègre la décentralisation, prend en compte les spécificités agroécologiques et sociales, et instaure un régime fiscal et douanier particulier afin de stimuler la production et atteindre l’autosuffisance alimentaire. Ces acquis offrent donc une base solide au développement du secteur. Toutefois, l’évolution du contexte impose une révision de la Loi afin de l’adapter aux défis actuels et de la rendre plus attractive pour les investissements, notamment étrangers. Il s’agit de corriger certaines lacunes, notamment en matière de régulation des semences, et de renforcer les garanties juridiques indispensables à l’encadrement et à la modernisation de l’agriculture », rapporte le compte rendu du Conseil des ministres.
Une des spécificités de la loi agricole de 2011 est qu’il encourage les Congolais à s’approprier ce secteur, à travers la disposition qui stipule qu’une entreprise agricole doit avoir au moins 51% des parts appartement aux Congolais. Cette disposition incitait justement les Congolais non seulement à contrôler ce secteur vital pour la sécurité alimentaire mais aussi appelait à plus d’investissements publics pour capitaliser les atouts comparatifs que la RDC a dans ce domaine.
Comment mettre l’agriculture au centre de la stratégie nationale de développement si le Gouvernement ne s’investit pas avec des actions concrètes pour que ce secteur vital soit contrôlé par des Congolais, pour le bien des Congolais et par des capitaux congolais.
A l’analyse de la sphère économique en RDC, l’agriculture paraît un secteur où les Congolais peuvent contrôler d’autant que des pans entiers de l’économie nationale sont entre les mains des opérateurs économiques étrangers. Des Mines aux télécommunications en passant par les banques commerciales, le commerce de grandes surfaces ou encore l’immobilier, sont autant des secteurs économiques avec ultramajoritairement des investissements étrangers.
La RDC dispose de 80 millions d’hectares de terres arables, 40 millions d’hectares de terres irrigables et d’une pluviométrie très favorable pour l’agriculture. Cependant, à ce jour, à peine moins de 10 % de ses terres arables sont exploitées. Ce qui a manqué jusqu’ici c’est une volonté politique forte, des réformes structurelles adéquates, des financements publics massifs et une cohérence des politiques publiques.

Pourtant, c’est dès son avènement au pouvoir en 2019 que Félix Tshisekedi a prôné sa vision de la « revanche du sol sur le sous-sol »vision claire*. Sept ans après, rien de consistant n’a été fait pour booster l’agriculture en RDC et inverser la donne. Car, la RDC débourse chaque année plus de 3,5 milliards USD pour importer des denrées alimentaires que le pays peut produire sur place. Pire, la RDC comptabilise à ce jour 27,5 millions de personnes livrées à l’insécurité alimentaire.
Faire de l’agriculture un levier de croissance, de paix sociale et de dignité humaine
Si sur le papier le Gouvernement alloue suffisamment des crédits pour le secteur agricol, en réalité très peu de fonds sont décaissés pour cette cause. En 2024, le secteur agricole était crédité de 1,1 milliard USD dans le budget mais, à peine le quart n’a été décaissé, encore qu’il faudrait auditer l’usage. De même, en 2025, c’est environ 1,3 milliard USD qui sont réservés à l’agriculture. Alors que nous sommes déjà au huitième mois de l’année, rien de concret n’a été investi dans l’agriculture.
La RDC peut faire de l’agriculture un véritable levier de croissance, de paix sociale et de dignité humaine. La « revanche du sol » est non seulement possible, mais vitale pour un avenir stable et prospère en RDC. Pour donner du sens à cette vision, plusieurs solutions sont à la portée due l’Executif national :Encourager les coopératives agricoles pour mutualiser les équipements, Faciliter l’accès à la terre et à la finance, Sécuriser les droits fonciers surtout pour les petits exploitants, Déployer des guichets agricoles dans les banques pour des crédits adaptés, Créer un fonds national de financement agricole garanti par l’État
De même, développer les infrastructures rurales, apprêter les routes agricoles pour relier les zones de production aux marchés, la logistique de stockage et de transformation pour limiter les pertes post-récolte, investir dans l’irrigation pour réduire la dépendance à la pluie, sont des actions indispensables pour réussir le décollage de l’agriculture au Congo Kinshasa.
Tout aussi, la promotion de l’agriculture en RDC passe forcément par la stimulation de la transformation agro-industrielle, l’attraction des investisseurs dans les filières agroalimentaires locales (manioc, maïs, riz, huile de palme…), la politique des incitations fiscales aux agro-industriels, la promotion des zones franches agricoles, les investissements ciblés dans la recherche, la formation et l’encadrement, le renforcement des instituts agronomiques (INERA, universités), le déploiement des agents d’encadrement agricole au niveau des territoires ou encore par la sensibilisation des jeunes à l’agriculture comme activité économique rentable.
C’est au bout de toutes ces actions, à mener de manière concertée, que la RDC peut tirer tous les bénéfices de ses millions de terres arables, à savoir la réduction de la dépendance alimentaire (importations), la hausse de la production vivrière et commerciale, la création de milliers d’emplois ruraux, le renforcement de la sécurité et de la souveraineté alimentaire, non sans oublier la diversification réelle de l’économie nationale en dehors du secteur minier.
Amédée mwarabu
